Ça y est, The Kills sont de retour. Après une pause de cinq ans due notamment à une blessure aux tendons qui empêchait le guitariste Jamie Hince de jouer, le fameux duo anglais revient avec son cinquième album. Et ce qui marque d'entrée avec Ash & Ice est sa générosité pour tout ce temps d'attente : treize titres pour une durée de cinquante-et-une minutes. Alors que les disques de rock ne vont guère plus au-delà des dix morceaux, Ash & Ice fait office d'omni en 2016.
Mais ce qui semble être une bonne nouvelle ne l'est finalement pas tant que ça, comme on peut le constater après plusieurs écoutes. Certes, on n'est pas contre davantage de musique de la part d'Alison et Jamie, mais quelques plages s'avèrent hélas être en-deçà du reste, dû avant tout à la production bien trop léchée pour The Kills. L'ensemble est en effet trop polish et surproduit pour pouvoir retrouver la rage d'antan, avec notamment un Heart Of A Dog qui en fait les frais – pourtant un excellent titre au demeurant, comme on a pu s'en apercevoir sur scène.
Mais tout cela s'oublie très vite lorsque l'on lance le disque. Car Ash & Ice s'ouvre, non pas sur une des meilleures compositions de l'album, mais tout bonnement sur une des meilleures du duo. Doing It To Death débute sur une boîte à rythme puis un synthé épileptique, lui conférant au premier abord une atmosphère étonnante, avant que ne surgisse férocement la guitare qui, avec un unique riff, annonce d'entrée la couleur.
Les mélodies sont à la fois crades et terriblement soignées, magistralement exécutées par un Jamie Hince plus en forme que jamais. Le chant d'Alison Mosshart se veut, lui, toujours aussi sensuel et envoûtant, délivrant le refrain le plus entêtant du groupe, d'apparence simple mais qui ne nous lâche plus de nombreux jours durant.
Moins sauvage que leurs deux premiers opus, Ash & Ice demeure toutefois fortement ancré dans les racines rock'n'roll des débuts. Qu'elles s'attachent à des beats électroniques (les somptueux Hard Habit To Break et Days Of Why And How, Impossible Tracks et son chant glam à souhait), du blues rock sous toutes ses formes (le grunge de Bitter Fruit, le gospel de Hum for Your Buzz) ou de la pop (le trop court That Love, la dream pop de Echo Home), The Kills restent fidèles à leur son qu'ils perfectionnent depuis plus de quinze ans.
Se voulant plus ambitieux que ses prédécesseurs, ce cinquième opus remplit de bien belle manière son contrat. Il contraste fortement par rapport au reste de la discographie du groupe, ne comprenant qu'une seule chanson qui passe sous la barre des trois minutes – qui n'est qui plus est pas un morceau rock classique estampillé The Kills mais la balade au piano That Love ! On peut reprocher à certaines compositions d'être un poil trop longues, la musique du duo restant bien souvent sous tension sans jamais exploser, mais ni l'inspiration ni le talent n'ont encore fait faux bond à Alison et Jamie, un exploit quand on les suit depuis leur EP Black Rooster !