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Kid Kapichi

There Goes The Neighbourhood

Kid Kapichi - There Goes The Neighbourhood
Chronique Album
Date de sortie : 15.03.2024
Label : Spinefarm Records
35
Rédigé par Adonis Didier, le 16 avril 2024
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A l'heure où s'enchaînent les sorties de Vegyn, Mount Kimbie, et English Teacher d'un côté, Frank Carter, Lauran Hibberd, et Kid Kapichi de l'autre, ne se pose plus qu'une seule question : de quel côté de la Force allez-vous basculer ? Vous qui balancez constamment entre l'envie d'avoir l'air cultivé et celle de profiter de la vie, entre le besoin de briller en société et celui de se laisser aller une bonne fois pour toutes. Fatigué de vous taper des heures de mesures arythmiques en lo-fi surmontées de spoken word, de revoir pour la vingtième fois 2001 l'Odyssée de l'espace quand deux visionnages auraient suffi à comprendre que vous n'y comprendrez rien, vous errez, fébrile, sur les applis de streaming, la gueule ouverte en recherche d'air, les oreilles prêtent à vivre enfin, vivre de toutes nouvelles expériences. Des expériences que la morale et vingt-huit ans à n'écouter que John Coltrane et les Pink Floyd réprouvent. Des expériences à plusieurs, à beaucoup même, car vous n'avez désormais plus besoin de votre casque ultra haute définition pour en apprécier les plaisirs.

Des expériences qui débutent ce jour où, souhaitant vous ambiancer au son du Battle Of Jericho de Kid Ory, la barre de recherche remplit automatiquement, et à votre grande surprise, Kid Kapichi en lieu et place du jazzman de New Orleans. Mais qu'est-ce donc, pensez vous alors ? Un autre jazzman du bayou, un nouvel artiste péruviano-boliviano-bangladais dont vous auriez étrangement manqué l'existence, un collectif d'arch-noise japonaise caché derrière des hologrammes de lapins-loutres kawaii ? Le single nommé Tamagotchi vous semble indiquer la dernière solution, alors vous pressez play, parce que vous aimez beaucoup l'arch-noise japonaise et les lollis (trop même).

De la grosse batterie massive, de la grosse disto fuzzy et baveuse, une grosse voix qui jacte avec la morgue adolescente de trentenaires fans des Offspring, chez Kid Kapichi tout est à la fois prépubère et surdimensionné, joueur universitaire de foot US stéroidé comme un poulet au KFC. Ça dégouline, ça dégueule, vous l'esthète, habitué des repas gastronomiques aux saveurs raffinées, découvrez enfin le tacos trois viandes du rock n'roll dans toute sa splendeur. Surpris de cet amas de saveurs et de textures mélangées dans des frites molles et un wrap grillé, vous risquez une deuxième bouchée, puis une troisième, incapable de reposer la bête, emporté dans cet élan de débauche qui, s'il n'est pas illégal, sera tout autant voire plus exotique et émoustillant au regard de votre cercle social qu'une proposition dans un donjon BDSM.
Une première moitié d'album passant comme la Wehrmacht dans votre délicate flore intestinale, que Subaru puis Angeline vous aideront à descendre avec un bon soda et trois parpaings de sucre. Des problèmes de coeur sur fond de pop-punk, et la plus fine plume romanesco-romantique pour traduire tout cela en mots : déjà l'idée de faire rimer Subaru avec kung-fu, si seulement vous saviez ce qu'était une Subaru, suivi d'un « elle est trop méchante Angeline » auquel Musset aurait sans doute répondu qu'on ne badine pas avec l'amour.

Intoxiqué par votre soif de sucres gras, vous acceptez, les pupilles dilatées, l'offre d'un donut glacé fourré à la fraise prenant la forme de Zombie Nation et de la surpuissante Oliver Twist. Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, et que vous n'étiez peut-être pas préparé à ça, Jimi sera pour vous comme une tisane, accompagnée d'un bon yaourt plein de bifidus actif. Une douce ballade conclusive à la manière de tant d'albums emblématiques du rock anglais, et même si There Goes The Neighbourhood ne fera jamais partie de cette caste sacrée, il ne méritera pour autant pas tout le dédain snob que le monde portera sur lui, du fait de son genre et de son apport glycémique légèrement surélevé.

Taclant autant la morosité anglaise, l'isolation du Brexit, l'aliénation au travail, que les problèmes de gin tonic et de Cindy qui veut mais qui veut pas, Kid Kapichi offrent un troisième album qui ne sera pas plus fin que les deux précédents, mais qui passera comme une grosse raclette lorsque frappe la dépression hivernale et les giboulées de printemps : à consommer avec modération, mais à consommer quand même, en pointant des majeurs dégoulinant de fromage en direction du 10 Downing Street.
tracklisting
    01. Artillery
  • 02. Let's Get To Work
  • 03. Tamagotchi
  • 04. Can EU Hear Me?
  • 05. Get Down
  • 06. 999
  • 07. Subaru
  • 08. Zombie Nation
  • 09. Angeline
  • 10. Oliver Twist
  • 11. Jimi
titres conseillés
    Tamagotchi, Jimi, Subaru
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