Mumm-Ra

En dépit de votre succès grandissant au Royaume-Uni, Mumm-Ra reste un groupe peu connu en France. Est-ce que vous pouvez m'en dire un peu plus sur votre rencontre ?

Noo : Oli a rencontré Tate dès son plus jeune âge, à la crèche ! Mumm-Ra est donc une histoire qui dure depuis longtemps ! (rires)
Oli : Et toi tu connaissais Gareth depuis l'école primaire, ce n'est pas lui qui t'avait volé ta toute première petite amie à cette époque ? (rires)
Noo : Un peu de sérieux...
Oli : D'accord... Mumm-Ra existe donc depuis environ 7 années. Il nous arrivait de jouer ensemble avant cela mais sans réel but. La musique a tout d'abord fait de nous des amis, on est toujours restés en contact et on a décidé un jour de monter un groupe tous ensemble.
Noo : On n'était pas très populaires en cours, les loosers du fond de la classe en quelque sorte... On avait des cheveux longs et gras et on vivait en retrait des autres jeunes de notre âge. Personne ne nous respectait, même ceux qui auraient dû avoir peur de nous car ils étaient plus jeunes n'hésitaient pas à nous chercher des embrouilles.

Rien de très sérieux donc... vous ne vous attendiez certainement pas à ce moment précis à toujours jouer dans Mumm-Ra une dizaine d'années plus tard ?

Oli : Certainement pas à nos débuts non. La musique c'était juste du plaisir pour nous, une occupation le week-end ou après l'école. On déconnait parfois sur la vie de rock star qu'on pourrait avoir un jour, ce qu'on ferait avec beaucoup d'argents et les filles qu'on pourrait draguer, mais rien de plus.
Noo : On a réalisé au bout de quatre ans qu'on avait un petit peu de talent et qu'avec beaucoup du travail on arriverait certainement à réussir quelque chose. C'est à partir de là qu'on a pensé à la musique comme une profession et un moyen de gagner notre vie. Avec du recul, on n'aurait jamais pu espérer cela sérieusement lorsqu'on jouait dans le garage entre potes. Ce n'était qu'un hobby.

Votre nom, Mumm-Ra, est inspiré d'un personnage du dessin animé Thundercats. Je suppose que c'est une vestige de vos passions d'adolescents ?

Noo : Notre nom originel était Mumm-Ra The Ever Living... complètement ridicule ! (rires). On a fait ce choix parque dans les films ou les dessins animés, les méchants sont toujours les plus intéressants. Enfin je suppose... C'était un nom simple et facile à retenir, peut-être un peu étrange à y regarder de près mais qu'importe.
Oli : En voyant notre noms les gens se demandent à quoi peut ressembler notre musique. Certains penses qu'on joue de la musique un peu folle comme du punk japonais, du jazz ou je ne sais quoi d'autre. Ca nous amuse et ça ne nous empêche pas de conserver notre propre style.

La musique que vous jouiez à vos débuts était orientée prog-rock, ce qui n'est vraiment plus le cas désormais ! C'est une sacrée évolution...

Oli : Notre musique a évolué en même temps que nous. On n'a jamais vraiment été influencé par les groupes à la mode, on n'a pas ce genre de considération. La différence majeure c'est qu'à nos débuts on n'accordait vraiment aucune importante à la structure de nos chansons, même si on essaye encore de conserver une certaine touche de confusion pour proposer quelque chose de novateur...
Noo : Le terme "prog-rock" me donne envie de vomir, je ne supporte pas qu'on puisse définir un groupe par cette expression. Le concept même du prog-rock me rend malade car pour moi Mumm-Ra est tout simplement un groupe expérimental.
Oli : On s'amusait beaucoup à nos débuts, on expérimentait des idées un peu étranges et certaines de nos chansons n'avaient ni queue ni tête ! Cette étape a été particulièrement importante pour nous car elle a vraiment marqué ce que nous sommes devenus aujourd'hui en tant que musiciens.
Noo : Beaucoup de groupes actuels se sont formés après avoir écouté les disques des Libertines. Ils ont voulu faire la même chose que Pete Doherty ou Carl Barat avec une certaine linéarité et sans avoir d'ambition musicale. Nous, on a d'abord voulu jouer sans s'inspirer de quiconque afin de pouvoir trouver notre voie.
Oli : C'est exactement le problème. Si les groupes étaient un peu plus originaux et ne cherchaient pas constamment à copier ou répéter une idée de base, peut-être seraient-ils plus intéressants... A quoi bon enregistrer une chanson si ce n'est qu'une copie d'autre chose ?

En 2005 et 2006 vous aviez sorti deux EPs auto-produits, Dance In France et Dance On The Shore, à quoi ressemblaient-ils ?

Oli : On voulait juste sortir quelque chose, avoir un disque à notre nom... les chansons étaient très bordéliques même si on retrouve encore certains des éléments dans nos chansons actuelles. C'était de la musique brute pour le fun, mal produite, mal enregistrée... tu vois le genre. Je garde toutefois un certain attachement à Dance In France car on l'avait enregistré pendant une semaine de vacances en France. On avait loué une petite maison à plusieurs, on avait pris notre matériel et on avait fait ce disque avec deux micros pourris. C'était vraiment artisanal.
Noo : L'atmosphère était parfaite. On buvait du vin, on mangeait du fromage et on jouait de la musique. On était à peine majeurs à ce moment là et on ressentait un grand sentiment de liberté. Nos deux EPs sont introuvables dans le commerce mais je suis relativement content que nos fans puissent les télécharger sur internet, c'est un avant-goût de ce que nous sommes devenus désormais.
Oli : Il faut bien comprendre que toutes chansons sont derrière nous, c'est un aspect passé du groupe mais je crois qu'il est intéressant de les écouter au moins une fois pour bien saisir notre évolution.

Vos expérimentations sont aussi perceptibles à travers le nombre considérable d'instruments que vous utilisez sur les chansons de vos EP ou de votre premier album...

Noo : On a volontairement voulu enregistrer un album très complet instrumentalement, avec des structures complexes et beaucoup d'orchestrations. C'était notre objectif principal et je pense qu'on a parfaitement réussi à le suivre. On se considère comme un bon groupe live et il fallait que le disque soit à la hauteur de nos prestations.
Oli : Obtenir un orchestre pour certaines chansons c'était un rêve qu'on a pu réaliser. Mais je ne veux pas que l'on puisse dire que c'est un caprice ou une idée stupide, si on a ajouté des arrangements sur certains titres c'est que cela les rendait meilleur.
Noo : Le processus créatif au sein du groupe est très démocratique. On essaye toujours de suivre les idées qu'un de nous peut proposer, et si au final tout le monde s'accorde, alors on estime qu'on peut conserver le résultat de cette expérimentation.

N'est-il pas trop compliqué de retranscrire tous ces arrangements en concert par la suite ?

Noo : On a eu très peur en écoutant la version finale de l'album car on ne pensait jamais réussir à faire honneur à ces chansons sans les dénaturer. On s'est tous dit "L'album est vraiment bon... mais merde, comment on va réussir à le jouer en live ?" (rires.)
Oli : On a laissé reposer le disque quelques temps puis on a beaucoup travaillé notre jeu de scène pour être à la hauteur. On a alors recruté Tommy, notre clavieriste, dans cette optique. Il apporte beaucoup à nos chansons en ajoutant des sons et des samples, sans lui le résultat serait sans doute un peu décevant.

Votre véritable premier album, These Things Move In Threes, sort à la fin du mois de mai en Europe. Pourquoi ce titre ?

Noo : C'est un concept-album sur les triangles...
Oli : Le nom a d'abord été choisi pour une des chansons du disque. Cette chanson peut sembler banale au premier abord, moins importante que certains de nos singles et peut-être même moins intéressante, mais pour nous c'est le pivot de l'album. On a débattu du titre pendant des semaines et on a fini par admettre qu'on devrait probablement dupliquer le nom d'une de nos chansons. Notre manager est ensuite venu nous voir pour nous proposer de retenir cette chanson et l'idée nous a semblé judicieuse.
Noo : Les paroles de la chanson correspondent vraiment bien avec notre univers un peu décalé. Pour moi, les événements de la vie, qu'ils soient bons ou mauvais, se répètent souvent à trois reprises. Et la chanson parle de ce mode de pensée...

Pourquoi être allé jusqu'en Espagne pour enregistrer ce disque ? C'est une destination plutôt inhabituelle...

Oli : On a choisi ce pays pour suivre notre producteur, Youth, qui venait de terminer la construction de son propre studio à Grenade. Pour nous ça ressemblait à des vacances dans une maison de campagne, il était hors de question de rater cette chance ! On savait qu'on allait travailler avec lui, et quand il nous a fait cette offre... on a également appris avec beaucoup de joie que ce studio est une copie de l'Olympic Studio de Londres dans lequel on avait déjà enregistré des chansons l'an dernier.
Noo : En partant si loin de chez nous, on savait qu'on pourrait pleinement se consacrer à l'enregistrement de l'album. Pendant trois semaines on n'a pensé qu'à cela. On se levait, on déjeunait et on partait travailler jusqu'au soir. On ne faisait vraiment rien d'autre.
Oli : On a réalisé par la suite que l'atmopshère dans laquelle on a travaillé était merveilleuse. On vivait tous dans la même pièce, comme des frères, et on s'entendait si bien que l'enregistrement n'était plus qu'une formalité. On était heureux, tout simplement...

Certaines de vos chansons semblent malgré tout un peu sombres ou tristes, comme Light Up This Room ou Down Down Down...

Noo : Oui et non ! Peut-être que ce disque peut sembler noir à première vue, mais certains titres comme She's Got You High sont très enjoués... différents sentiments sont mêlés sur ce disque et il me semble difficile de pouvoir y faire un tri. Tu peux trouver la face sombre de Mumm-Ra puis découvrir sur une autre chanson un aspect plus joyeux... je pense que les gens ne réalisent pas bien cela quand ils écoutent notre musique, nous avons plusieurs facettes et chacune est tout aussi importante que les autres.
Oli : J'entends souvent des personnes dire que nos chansons enjouées nous sont commandées par notre label car ce sont celles-ci qui nous permettent de vendre des disques. Alors quoi ? Les chansons tristes seraient nos vraies chansons ? Il ne faut pas tout mélanger, on aime différentes choses et différents sentiments, et on essaye de tous les exprimer.

Par quoi ces sentiments vous sont-ils inspirés en général ?

Noo : Des sujets très classiques à notre âge... nos familles, les personnes qu'on aime et celles qui nous ont quittés. Tout ce que cela peut engendrer aussi, la frustration d'être éloigné des êtres qui te sont chers lorsque tu pars en tournée loin de chez toi. Tout ce qu'on a pu vivre ces dernières années en grandissant.

Venons en à votre première venue en France au mois de novembre. Quel souvenir en gardez-vous ?

Oli : Ce fut une tournée vraiment incroyable et surprenante. On n'attendait rien de ces quelques concerts et la soirée à la Cigale reste un de nos meilleurs souvenirs à ce jour. La salle était superbe et le public nous a beaucoup soutenu et encouragé. Pendant tout le concert je voyais la fosse sauter dans tous les sens comme sur un trampoline. C'est pour vivre ce genre d'expérience que j'aime faire partie d'un groupe.

Vous reviendrez aussi cet été pour jouer notamment en première partie de Muse. C'est une étape importante pour vous ?

Oli : Je préfère ne pas y penser... J'ai été choqué de voir à quel point certaines salles peuvent être énormes lorsqu'on a joué avec les Killers au Royaume-Uni, alors en festival ce sera sans doute pire !
Noo : D'une certaine manière, plus la fosse va être grande et plus je vais prendre de plaisir à me produire sur scène. C'est un défi de tenter de plaire à des milliers de personnes à la fois, surtout quand tu es très peu connu et que tu peux faire jouer l'effet de surprise.

Vous semblez vraiment très excités par les prochaines échéances !

Noo : On attend pour le moment la sortie de l'album et ensuite tout va s'enchaîner pour nous... si les gens l'achètent. On a attendu tant d'années pour en arriver là, on a vécu tant de frustrations, tant d'attente ! On n'a aucune espérance particulière en terme de ventes, mais on espère pouvoir durer encore longtemps pour jouer partout dans le monde. Et aussi à Glastonbury, c'est mon ambition personnelle.