Chronique Album
Date de sortie : 14.10.2013
Label : City Slang
Rédigé par
Emmanuel Stranadica, le 7 octobre 2013
Vingt ans de carrière, ça se fête. Mais pas de n'importe quelle manière, surtout quand on s'appelle Tindersticks. Les anglais de Nottingham ont donc choisi de célébrer cet évènement d'une manière très sobre. En l'occurrence, réenregistrer dix titres de leur répertoire dans des versions inédites. Cela pourrait laisser un peu dubitatifs les fans qui s'attendaient à un véritable nouvel album, et pourtant cette idée fait sens.
Tout d'abord parce que le groupe a choisi les mythiques studios d'Abbey Road pour réaliser ce lifting musical. Celui-ci se traduit par une lumineuse réorchestration des classiques et de chansons moins attendues de leur immense répertoire. Ensuite, parce que le tracklisting, somme toute un peu surprenant, est parfaitement cohérent. Les chansons choisies par le groupe montrent à quel point les Tindersticks d'aujourd'hui n'ont plus rien à voir avec ceux d'antan. A l'exception de Say Goodbye To The City, issu de Waiting for The moon, la tension qui faisait naguère partie du quotidien de ce groupe est une absente de marque sur cet album. A contrario la formation britannique se montre parfaitement apaisée, comme miraculée après toutes ces années où on pouvait associer les Tindersticks à un groupe d'écorchés.
En effet, ces derniers semblent avoir atteint la sagesse. Friday Night, plage d'ouverture de Across Six Leap Years, en est une parfaite illustration. Originellement disponible sur le premier album solo de Stuart Staples, la version réenregistrée apparait bien plus accomplie au niveau sonore, et la voix, reconnaissable entre mille, du crooner anglais semble aussi avoir gagné en chaleur. Car ce qui est essentiel sur cet album, ce n'est nullement un bouleversement dans ces nouvelles performances sonores, mais bien un rendu délicat, peaufiné voire sublimé des compositions initiales.
Alors, bien sûr certains pourront regretter l'absence de tubes, si toutefois il est envisageable de parler de tubes avec ce groupe. Point de City Sickness, de Can We Start Again? ou encore de Bathtime sur ce disque. Juste une collection de perles musicales telles que A Night In, Sleepy Song ou encore What Are You Fighting For?, injustement oubliée sur The Hungry Saw, l'album du retour en 2008 après cinq longues années de silence.
En définitive la seule véritable difficulté rencontrée avec ce disque est de réussir à critiquer certaines relectures ou de trouver certaines versions moins réussies que d'autres. Car le quintet excelle dans l'art subtil de savoir nous charmer à l'aide de sons, de mélodies ou d'harmonies vocales dont eux seuls possèdent le secret.
Les Tindersticks atteignent ici la grâce le temps d'une cinquantaine de minutes via dix compositions. L'harmonie déployée dans ces lumineuses adaptations permet au groupe d'apporter une nouvelle pierre à cet édifice qu'est leur discographie pourtant déjà incontestablement parfaite. On peut se demander jusqu'où ils iront. Réponse dans dix ans à l'occasion de leur trentième anniversaire ?