Chronique Album
Date de sortie : 02.05.2005
Label : BMG
Rédigé par
David, le 9 juin 2005
Suite logique du déjà réjouissant Dreamland sorti il y a 3 ans, ce nouvel album du mythique chanteur de Led Zeppelin risque de surprendre plus d’un curieux qui arrivera tant bien que mal à se le procurer tant sa sortie se retrouve malheureusement coincée parmi l’énorme embouteillage de fin de printemps / début d’été que l’on connaît.
En effet, Robert Plant prouve avec ce Mighty Rearranger qu’il est encore capable d’envoûter et de séduire mais surtout de se créer un univers personnel inimitable dans lequel les instruments et sonorités orientales viennent renforcer le coté «blues-rock» de sa musique là où certains craignaient de le voir s’embourber dans de la «world» fade et sans intérêt.
D’entrée de jeu, Another Tribe rassure puisqu’il semble sortir tout droit du concert événementiel No Quarter/Unledded de 1994 et qu’il nous permet de redécouvrir une nouvelle fois la voix éraillée mais tellement lumineuse de Robert Plant. Même s’il n’atteint plus (pour le plus grand bonheur de certains) les aigus aériens de l’époque du dirigeable (évolution somme toute logique pour lui puisqu’il atteint quand même cette année les…57 ans!), son timbre inimitable s’avère être le liant indispensable à la bonne tenue de cet album qui navigue musicalement entre blues stonien (Let The Four Winds Blow) ou limite vaudou (l’inquiétant The Enchanter) et escapades tribales (le très réussi Somebody Knocking).
Mais s’il apparaît plutôt logique de retrouver avec plaisir sa voix exceptionnelle, on est par contre franchement épaté par la qualité des compositions de ce Mighty Rearranger (à l’exception peut-être d’un Dancing In Heaven plus pop et un peu faiblard et de ce Brother Ray de clôture qui est plus une jam qu’un véritable morceau).
Il y a tout d’abord ce premier single flamboyant, Shine It All Around, qui s’impose dès la première écoute en grande partie grâce à la frappe lourde et pesante de l’ex-Portishead Clive Deamer (qui reprend le même effet de caisse claire «trainante» que celui de l’immense John Bonham…risqué mais réussi!) et la magnifique ligne de basse fluide de Billy Fuller.
Mais ce n’est pas tout; alors qu’on ressort réellement impressionné du sur-vitaminé Freedom Fries, on est happé par l’intro lancinante de l’incontournable de ce disque nommé Tin Pan Valley: une ambiance à la Massive Attack (certainement liée à la présence de John Baggott aux claviers et arrangements!) avec une partie vocale chuchotée jusqu’à l’explosion du refrain qui renvoie aux meilleurs moments de Physical Graffity, ce morceau est absolument énorme et mériterait d’être introduit de force dans les oreilles de tout ceux qui pense honteusement que Robert Plant devrait maintenant laisser la place aux plus jeunes (et puis à qui d’abord ? Soyons sérieux…)
La transition avec All The King Horses est d’autant plus réussie que cette géniale ballade acoustique (renvoyant légèrement à Going to California) se permet de changer encore de registre avec succès puisque Plant, en impressionnant fil conducteur, continue à nous emmener découvrir son royaume aussi diversifié que passionnant.
Enfin, l’album aurait certainement gagné à se clore sur la chanson titre Mighty Rearranger sur laquelle les Black Keys semblent avoir été convoqués pour réussir un blues d’exception à la fois très classique dans le fond mais incroyablement innovant dans la forme.
Retour impressionnant donc pour Robert Plant qui a eu la bonne idée de réunir une nouvelle fois ces musiciens d’exceptions (pour rappel, deux ex-Portishead, un ex-Cast et l’un des ex-guitaristes de Sinead O’Connor) sous ce patronyme des Strange Sensation et d’accoucher de cet effort qui peut aussi bien ravir le fan absolu de Led Zeppelin possédant leur intégrale que (et c’est bien là le plus important) la personne n’ayant jamais entendu une seule fois l’exceptionnelle voix de ce monsieur.
Grand disque, varié et surtout résolument moderne par son mélange de sonorités, il ne reste maintenant plus qu’à espérer que ce Mighty Rearranger arrive à se tailler un chemin, à la machette s’il le faut, dans la jungle pop-rock actuelle.
Vivement Rock En Seine…