Chronique Album
Date de sortie : 29.06.2018
Label : Parlophone
Rédigé par
Cassandre Gouillaud, le 10 juillet 2018
Nous voici en plein coeur d'années placées sous le signe de Gorillaz. Après la sortie de Humanz il y a un peu plus d'un an, la bande animée de Damon Albarn et de Jamie Hewlett est de retour avec The Now Now, un album essentiellement composé sur la route qui prend le contrepied du projet grandiloquent de son grand frère. À la manière de l'articulation entre Plastic Beach et The Fall, ce sixième album, né du retour à la scène du groupe, se défait des très (trop ?) nombreuses collaborations qui parsemaient Humanz pour proposer un aller-simple aux bases les plus élémentaires de la plus célèbre formation virtuelle.
Reléguées donc les aventures solo, mises de côté celles de Blur, c'est du côté de Gorillaz qu'il faut se tenir pour continuer à suivre avec attention les mouvements musicaux de Damon Albarn. The Now Now évolue dans un registre pop estival, contrebalancé par des thématiques qui touchent à la solitude, l'isolement, les excès qui touchent les êtres humains. Humility, qui ouvre l'album en featuring avec George Benson, illustre cette dichotomie en faisant dialoguer une mélodie groovy et ces récits de solitude. Elle est aussi l'une des seules collaborations de cet album, aux côtés de l'échappée funk Hollywood sur laquelle s'allient les forces de Snoop Dogg et de Jamie Principle, pour un hymne, hautement amer, sur les promesses qu'offrent ces célèbres collines sans les tenir.
Là où Humanz faisait presque figure d'hédoniste, The Now Now marque un arrêt presque abrupt à cette fête insouciante que son prédécesseur avait voulu initier. Ce nouvel album vogue de lieu en lieu (Hollywood, Kansas, Idaho, Lake Zurich) et fait valoir une approche bien plus intimiste et mélancolique aux terres qu'il visite. Ce sentiment culmine plus particulièrement sur la ballade Idaho, l'un des seules morceaux de l'album qui contraste avec cet air enlevé qui ne faiblit pas. The Now Now est aussi un retour puissant à la première personne, qui domine la structure narrative et occupe logiquement le coeur du récit. Damon Albarn livre ainsi, par sa voix, une histoire intime et personnelle qui se fait théâtre d'un retour sur soi, comme las des exubérances collectives dont le précédent album faisait l'éloge.
Une fois encore, Gorillaz se laissent donc tenter par ces albums miroirs, qui reflètent des réalités autrement interprétées et prennent des chemins artistiques presque radicalement opposées. Après le tumulte du premier, pas encore tout à fait oublié, le calme relatif du second apparaît presque comme une trêve bienvenue et une occasion de réentendre à nouveau plus distinctement le talent de Damon Albarn. The Now Now est donc un album discret, plein de touches réussies. S'il ne connaît pas de moments particulièrement glorieux, il reste pourtant élégant dans sa discrétion, dans ces petites choses que seraient par exemple la progression claire de One Percent ou l'efficace changement de tempo de Souk Eye. Et l'élégance, parfois, est tout ce que l'on demande à un album.