2023 s'annonce comme une belle moisson de nouveaux talents. Non, ceci n'est pas l'introduction type à la chronique d'un énième nouveau groupe qui fait déjà l'objet des superlatifs aussi inventifs que creux de la presse anglaise. On ne singe pas les autres ici, ça n'est pas le genre de la maison. C'est bien avec conviction que l'on va vous vanter les mérites de Howling At A Concrete Moon, premier album de Pynch, quartet basé à Londres et mené par Spencer Enock, jeune compositeur guitariste moustachu (tiens, un signe qui ne trompe pas) offrant un indie rock très efficace, pas du tout maniéré et surtout très inspiré.
Nous n'annoncerons pas non plus la fin de la dernière vague post-punk, la source étant loin d'être tarie, quitte à légèrement déborder de son lit avec un choix des plus foisonnants. Néanmoins, Pynch signent ici un retour aux guitares lumineuses et aux angles arrondis, à une section rythmique punchy mais jamais trop excentrique, avec cette touche électro pop qui vient étoffer la musicalité ambiante lui donnant une fraîcheur qui fait grandement du bien.
Pynch jouent de la musique sur laquelle on entame très naturellement quelques pas de danse discrètement au bureau ou dans son salon et qui séduit quasi automatiquement grâce au chant, un vrai chant, ni hurlé ni déclamé. Un de ceux qui manquent un peu à l'appel ces derniers temps chez les représentants de la génération Z.
A ce propos, c'est en hommage à elle que Pynch nous dévoilent 2009, premier single qui évoque naïvement l'adolescence des musiciens, à base de skate, de heavy metal et de coiffure dont on rit un peu jaune quelques années plus tard. Il ne s'agit pas de narrer les histoires torturées de ces années toujours délicates, mais plutôt de partager une ode à cette innocence que l'on commence à perdre alors et qui forge nos caractères d'adultes en devenir.
Bercés par la scène britannique ayant percé ces années-là, on pense aux mélodies de Klaxons et The Kooks, si bien équilibrées, où l'on ressent immédiatement une énergie positive qui n'a pas d'autre but que de nous divertir.
Disco Lights, premier single paru dès 2019 chez Speedy Wunderground, est présent et pose instantanément le décor dans lequel se plante le petit monde de Pynch : c'est doux, mélodieux, entrainant, et un autre signe qui ne trompe pas, cela s'imprègne dans nos esprits. Voilà l'exemple parfait de la mélodie qui va revenir pointer le bout de son nez tout au long des journées qui vont suivre les premières écoutes, dont nous ne déterminerons pas immédiatement l'origine, ce qui va passablement nous agacer, mais qui dès que nous aurons retrouvé nos esprits va nous faire revenir inlassablement vers elle.
Autres exemples de « feel good music » que nous offre Howling At A Concrete Moon, Tin Foil avec son petit synthé Bontempi pétillant, Karaoke et sa ligne de Melodica très classe, et le délicat The City (Part 2). Ce dernier, qui étonnamment précède The City (Part 1), venant casser totalement le rythme de croisière de la première partie de l'album en nous entraînant vers un son plus pop et synthétique accompagné de quelques riffs de guitares de fort bon goût, histoire de pimenter la fin du voyage jusqu'au raffiné London (dont on souligne l'excellent choix d'en faire un single) et le très dancefloor compatible Somebody Else.
Pynch proposent un premier album très réussi, riche en nuances et démontrant un haut sens de la mélodie catchy et harmonieuse forgé par une belle érudition musicale. Sans s'enfermer dans un registre trop restreint, les Anglais s'ouvrent ainsi toutes les portes d'une pop-rock qui va sans aucun doute continuer à fructifier dans les années à venir. Premier aperçu en live le 6 mai à l'International à Paris.