Quand un artiste a une discographie quasi parfaite comme celle de Madness, chaque nouvelle production est un pari. Alors que d'autres peinent à se renouveler ou, au minimum, à rester intéressants, les Nutty Boys ne sont pas en manque d'inspiration. Après sept ans de silence, ils reviennent avec un nouvel album plein de mélodies et d'histoires à raconter, des vraies chansons en résumé. L'opus s'écoute de bout en bout et contient même plusieurs titres qui peuvent devenir des classiques !
Pour Theatre Of The Absurd Presents C'est La Vie, le groupe s'aventure dans le West End, le quartier des théâtres de Londres. L'ambiance est flamboyante et nous plonge dans le music-hall, les comédies musicales avec costumes et chorégraphies, aucune chance que tout ce cirque ne tienne dans un petit club de Camden. Le spectacle est total. La pièce se joue en trois actes, avec un prologue et un épilogue qui ne sont pas là pour faire de la figuration. Dans le prologue, donc, le groupe se met en place et plante le décor avant un premier acte joué en grand et justifiant l'immensité de la scène. L'acte 2 est quant à lieu vite expédié en un titre, Round We Go, qui résume à lui seul le style de Madness. Le dernier acte est plus nostalgique et sonne comme un flashback vers les années 70s et 80s. Et quand tout semble joué, l'épilogue prend une tournure plus engagée : Run For Your Life sonne Blaxploitation, Set Me Free parle d'émancipation et In My Street de la solidarité de quartier.
Jamais en manque d'ironie, on ne sait pas très bien si le théâtre de l'absurde représente une comédie loufoque, ou s'il chronique un monde de plus en plus absurde. Les chansons sont sur un fil entre le doux et l'amer. Baby Burglar, par exemple, a des airs de fête. Les cuivres y sont pour beaucoup, et une mélodie en accords mineurs reflète la tristesse de la situation, en l'occurrence celle d'un gamin en train de cambrioler un des membres du groupe. Ne vous fiez pas à l'énergie juvénile de Madness, chacun peut être un gamin à leurs yeux, et pour un groupe aussi conscient que fier de ses débuts, ça n'a rien de péjoratif.
Le mélange de joie et de mélancolie donne une patine de nostalgie aux morceaux, un sentiment renforcé par le son intemporel de l'album. Quand il y a des claviers, ils sont vintages, les effets sont utilisés comme des décors pour renforcer l'ambiance d'une scène qui sera jouée entre les années 1930 et 1980. C'est aussi le premier album dont ils prennent la production en main après avoir travaillé avec le même producteur pendant quarante-cinq ans et être toujours restés fidèles à leur son sans jamais succomber aux sirènes du moment. Avec l'aide de Matt Glasbey (Sorry, The Magic Gang, alt-J) qui a transformé leur espace de répétition en studio d'enregistrement, cette indépendance assumée marque (enfin) la prise de conscience de leur potentiel et de leur capacité à réaliser eux-mêmes leurs délires.
A noter que l'album est dédié à Terry Hall, chanteur de The Specials avec qui ils ont partagé leurs premières scènes, un très bel hommage.
tracklisting
01. Prologue : 'Mr Beckett Sir...'
02. Theatre Of The Absurd
03. If I Go Mad
04. Baby Burglar
05. Act One : 'Surrounded On All Sides...'
06. C’est La Vie
07. What On Earth Is It (You Take Me For?)
08. Hour Of Need
09. Act Two : 'The Damsel In Distress...'
10. Round We Go
11. Act Three : 'The Situation Deteriorates...'
12. Lockdown And Frack Off
13. Beginners 101
14. Is There Anybody Out There?
15. The Law According To Dr. Kippah
16. Epilogue : 'And So Ladies And Gentlemen...'
17. Run For Your Life
18. Set Me Free (Let Me Be)
19. In My Street
20. Fin. : 'Ladies And Gentlemen...'
titres conseillés
Theatre Of The Absurd - Baby Burglar - What On Earth Is It (You Take Me For?) - The Law According To Dr. Kippah - Set Me Free (Let Me Be)