Liam Gallagher John Squire

Quel rejeton pourrait bien engendrer la rencontre entre deux légendes du rock anglais made in Manchester ? Celle des cordes vocales en airain, éraillées et nasillardes, de Liam Gallagher et des guitares psyché de John Squire ? La paire annonçant ni plus ni moins que le « meilleur album rock depuis Revolver », la curiosité était à son comble avant l'écoute.

Autant le dire d'emblée, la promesse du duo n'est pas tenue (on s'y attendait un peu) : les Beatles peuvent dormir sur leurs huit oreilles. Tout n'est pas à jeter, loin de là, mais si certaines chansons s'envolent, d'autres peinent à convaincre.
Pourtant, l'album démarre fort avec trois morceaux franchement enthousiasmants. Le duo y sonne un peu comme une version 2024 des légendaires The La's. Raise Your Hands est irrésistible avec un refrain qu'on a envie de se repasser en boucle. From Mars To Liverpool est aussi très réussie, entre Big Star et les Beatles, tout comme la power northern pop One Day At A Time. Tendus, mélodiques, riches en rebondissement, ces morceaux se révèlent vite addictifs.

C'est que la paire Gallagher Squire a eu la bonne idée de (très) bien s'entourer. La production, et la basse, sont assurées par Greg Kurstin, l'homme déjà derrière la réussite des albums solo de Liam Gallagher et qui sait parfaitement faire sonner le mancunien. Derrière les futs, on retrouve le génial Joey Waronker, batteur historique de Beck qui a aussi joué derrière un aéropage mondial du rock, de Paul McCartney, à Thom Yorke, Air, Gnarls Barkley ou encore Leonard Cohen. Forcément, la production est irréprochable : le son est cristallin, brillant et dynamique.

Pourtant, l'enthousiasme ne tarde pas à retomber. La faute à un songwriting pas toujours des plus affûtés. « I'm so bored with these songs » chante Liam vers la fin de l'album. C'est un peu ce que l'auditeur risque de se dire à l'écoute de certains riffs déjà entendus mille fois ou trop marqués par des influences passéistes. I'm A Wheel, malgré un beau refrain, est plombé par un plan bluesy usé jusqu'à la corde en guise de couplet. I'm So Bored, justement, singe les première notes du riff de Paperback Writer. Just Another Rainbow sonne comme une cover de Waterfall des Stone Roses mixée à (Probably) All In The Mind d'Oasis, le tout avec un solo sans grand intérêt. You're Not The Only One et son piano répétitif rappellent certains ratages de Beady Eye, comme ce premier single Bring The Light qui avait cueilli tout le monde à froid. Love You Forever, resucé de Jimmy Hendrix, ennuie gentiment.

Loin du plantage complet mais aussi bien loin du chef d'œuvre annoncé, Liam Gallagher John Squire manque d'un peu de folie pour se ranger dans la case des disques inoubliables. Sur l'échelle Liam Gallagher, l'album trouve sa place entre l'ennui pataud de Beady Eye et la réussite audacieuse de ses albums solo. Si l'album ravira certainement quelques adeptes de tribute bands, il restera pour l'amateur d'indie rock un peu plus aventureux un LP excellement produit avec un trio de chansons pour égayer sa playlist Spotify ou Deezer de l'année.