Orlando Weeks

Beaucoup de nouvelles pour les fans de The Maccabees : Orlando Weeks et les frères White sortent des albums. Je laisse le soin à mon estimée collègue de vous dire ce qu'elle pense du premier album de 86TVs, en ce qui me concerne, après deux disques un peu trop larmoyants à mon goût, LOJA est venu comme une délicieuse surprise.

Cette troisième sortie est comme une renaissance pour son auteur, un peu comme s'il était enfin devenu adulte, ou si la paternité l'avait désinhibé pour suivre ses véritables aspirations. Sous l'impulsion de sa compagne, il est parti s'installer à Lisbonne et il s'est construit un atelier dans une ancienne boutique (ndlr : Loja en portugais) pour s'adonner à sa vocation initiale, le dessin et la gravure.

En effet, Orlando a fréquenté une école d'art où il a rencontré les membres de son ancien groupe, mais c'était avant tout vers les arts graphiques que se destinait le jeune chanteur. Pour la sortie de LOJA, dont il a réalisé tout le design, il a donné une série de showcases dans une galerie londonienne dans laquelle il exposait ses linogravures pour la première fois, et l'événement semble l'avoir excité au moins autant que la présentation de ses nouvelles chansons.


LOJA est l'aboutissement d'une trajectoire de vie et d'un processus artistique qui ont pris pas mal de détours. L'anglais a écrit les chansons entre Londres et Lisbonne, puis les a enregistrées dans une ancienne abbaye transformée sur l'île de Wight. Pour la première fois depuis le début de sa carrière solo, il s'est entouré de musiciens, ceux qui l'accompagnaient sur scène pour rester en territoire connu. A la production, il a fait appel à Sergio Maschetzko, ingénieur du son lors de ses concerts et qui a produit l'excellent Ants From Up There de Black Country, New Road.

Sur l'île de Wight, il a été rejoint par Rhian Teasdale (moitié de Wet Leg), venue en voisine poser sa voix sur Dig. Ce premier extrait nous avait bien plu et nous laissait attendre un album intéressant puisque ce morceau de trois minutes passait par plus de changements de sons et d'ambiance que n'importe lequel de ses précédents essais solo.

Orlando a gagné suffisamment de confiance en lui pour savoir écouter ses doutes. Le résultat des sessions ne lui convenait pas complètement, et il a pris le temps de mûrir son projet, se consacrant à la gravure dans sa boutique atelier. Enfin prêt, c'est avec le producteur de son précédent album, Nathan Jerkins aka BULLION, qu'il a fini de mixer l'album qui est devenu LOJA.

Chaque chanson trouve sa place dans un savant équilibre entre introspection, balade urbaine, et évasion vers les grands espaces. La voix n'a plus besoin d'en faire des tonnes, elle est soutenue par des instrumentaux riches et inventifs qui s'enrichissent mutuellement. Par exemple, You & The Packhorse Blues est bourré d'idées et de petits gimmicks musicaux qui font regretter que le morceau ne s'étende pas au-delà des quatre minutes tellement il est confortable de se laisser bercer dans cette mélancolie nostalgique. Mais çcela aurait retardé une Good To See You qui arrive à être entraînante malgré un tempo à 92 BPM.


Après un final au violon discordant, Tomorrow, Orlando Weeks clôt l'album par Beautiful Place, archétype de la ballade mélancolique de son travail solo, comme un bonus ou une parenthèse pour un disque passionnant.

C'est entouré de collaborateurs qu'il connaît, y compris Katy J Pearson qui revient poser sa voix sur My Love Is (Daylight Saving), qu'Orlando donne le meilleur de lui-même comme au temps de son défunt groupe. Ses travaux de graphiste en solo permettent peut-être enfin à l'artiste de canaliser sa créativité entre ce qui doit être fait seul ou à plusieurs.