Chronique Album
Date de sortie : 30.08.2024
Label : Sub Pop Records
Rédigé par
Adonis Didier, le 29 août 2024
Un problème d'insectes ? The Bug Club ! Un logiciel qui plante ? The Bug Club ! Ça manque de rock n'roll dans votre vie ? The Bug Club ! Besoin de comprendre les complexes mécanismes internes d'un système capitaliste et inhumain qui aspire jour après jour votre âme ? On The Intricate Inner Workings Of The System, par The Bug Club. Celui-ci est le troisième album du groupe, et ce malgré le fait que celui-ci ne publie que depuis 2021, plus un nombre d'autres sorties indescriptibles et des centaines de concerts, Sam Willmett et Tilly Harris font et écrivent la musique vite et fort, accompagnés dans leurs pérégrinations par Dan Matthew, parce qu'avoir un batteur dans un groupe de punk-rock c'est toujours utile.
Et alors, qu'est-ce que c'est donc les incompréhensibles rouages du système ? Si on s'en tient à ce que raconte l'album, les films de guerre, les pintes de qualité, les singles de pop, les beaux gosses émo dans les cimetières, James Bond, et les baskets sans lacets de chez Lonsdale. Probablement pas les premiers mots d'un traité de sociologie, mais qu'est-ce que la société actuelle si ce n'est des standards inatteignables de courage, de charisme, et de beauté apportés par l'Oncle Sam, une quête de la réussite consistant le plus souvent à se vendre sans foi ni loi au mainstream capitaliste, une tendance de la jeunesse à se trouver des passe-temps en marge du bon sens et de leurs parents, et pour finir l'alcoolisme et la mode toujours aussi incompréhensible des anglais.
Alors The Bug Club découpent et dissèquent le système mondial depuis leur Pays de Galles natal, par des biais et des sujets qui leur sont propres, balançant bombinettes sur bombinettes pleines de fuzz, les constats s'enchaînent sans jamais dépasser les trois minutes, et c'est tout le rock, le punk et le post-punk des soixante dernières années qui y passe. War Movies pour le gros son crado, Quality Pints pour le punk publicitaire sous cocaïne, Pop Single partait pour se payer la tête du mainstream et devient le meilleur single pop sorti depuis les Kinks, A Bit Like James Bond se répète tellement qu'on dirait les Ramones, We Don't Care About That se glisse entre la disto-fuzz groovy de T. Rex et la grande vague post-punk de la décennie, Lonsdale Slipons partage la structure basse prédominante et double-voix de leurs potes de PROJECTOR, et Better Than Good est une démo volée du Velvet Underground qui nous rappelle qu'on ne pourra jamais devenir plus mieux que bien.
De la même manière, The Bug Club ne font jamais réellement mieux que leurs nombreux compatriotes, mais ils le font toujours assez bien et d'assez de façons différentes pour rendre service à leur écriture moderne et caustique, et générer une identité et une cohérence sortant cet album de la masse informe, lui donnant une raison d'être et un intérêt dépassant la recherche musicale et l'originalité à tout prix. The Bug Club, en somme, c'est refaire le monde avec des potes à trois heures du matin dans un garage avec une guitare, une basse, une batterie, et beaucoup de pintes de qualité. Ce moment de la nuit et du taux d'alcoolémie où l'on est prêt à tout avouer, de l'Actual Pain au Cold. Hard. Love., de tous ces sujets dont on se fout parce qu'on est jeune, dépressif, et amoureux, et enfin de la manière dont fonctionne un système qui dépasse désormais les gens mêmes censés l'expliquer et le raisonner.
On The Intricate Inner Workings Of The System, un album sincère qui ne révolutionnera pas la musique, mais qui nous fera passer un bon gros moment cool entre jeunes cons anti-système. Quelle meilleure définition du rock n'roll que celle-ci ?