Chronique Album
Date de sortie : 04.04.2025
Label : Bella Union
Rédigé par
Emmanuel Stranadica, le 4 avril 2025
Alors qu'elle avait tiré un trait sur la musique après la séparation de Lush en 1996, Miki Berenyi n'a cessé de se réinventer depuis son grand retour. Après la reformation éphémère de son groupe en 2015, elle s'est investie dans l'aventure Piroshka le temps de deux excellents albums. Cette parenthèse désormais close, la voici de retour sous une nouvelle identité : Miki Berenyi Trio.
Pour la première fois, la chanteuse anglo-japonaise appose son propre nom sur un disque. Entourée de son compagnon, l'ex-Moose Kevin McKillop, et de l'Australien Oliver Cherer, elle a d'abord publié, en fin d'année dernière, un EP revisitant quatre titres de Lush, une mise en bouche avant de se lancer pleinement dans l'inédit. Avec Tripla, le trio dévoile neuf compositions originales et s'aventure sur un terrain plus électro que ce à quoi Piroshka nous avait habitués.
Le premier extrait, Vertigo, séduit d'emblée avec son intro électronique et son tempo mélancolique, sublimé par la voix reconnaissable entre toutes de Miki Berenyi. Mais la particularité de MB3 (l'autre appellation du groupe) réside aussi dans l'absence de batteur, un choix qui confère à l'ensemble une texture sonore singulière. L'ouverture de l'album, 8th Deadly Sin, installe une ambiance planante, mêlant nappes ambient, guitares ciselées et un rythme qui rappelle les heures de gloire du label 4AD.
Plus délicat, Kinch s'orne de sonorités électroniques aux influences asiatiques, renouant avec la mélancolie envoûtante qui faisait la magie de Lush. Les thématiques abordées sur Tripla ne sont pas des plus légères : environnement, masculinité toxique, dépression... Pourtant, l'album semble suivre une progression, voire une transformation au fur et à mesure de sa progression. Gango, avec son approche flirtant avec le dub, amorce déjà un virage sonore. Mais c'est Big I Am, autre simple extrait, qui nous surprend avec son groove dansant, tandis que Hurricane enfonce le clou avec une énergie encore plus irrésistible. Si le tempo finit par ralentir, MB3 réserve encore quelques pépites, à l'image de Manu, dont l'esthétique très 80's est rehaussée par un saxophone délicatement placé en arrière-plan. Enfin, Ubique clôt l'album sur une note lumineuse et exotique, offrant un contraste bienvenu après des textes plutôt sombres.
Produit par Paul Gregory de Lanterns On The Lake, Tripla est un album introspectif et nostalgique, mais jamais désespéré. Au contraire, en évitant le piège du pastiche, Miki, Kevin et Oliver livrent un disque audacieux, ancré dans son époque, et profondément sincère.