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La Route du Rock

Saint-Malo, du 14 au 17 août 2024

Live-report rédigé par Franck Narquin le 21 août 2024

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Jour 1, vous n'êtes pas prêts !

Saint-Malo, vous êtes là ? Je ne vous entends pas ! Voilà, c'est mieux ! Saint-Malo, vous êtes prêts ? Non, vous n'êtes pas prêts ! On vous voit encore à vous prélasser sur la plage, à faire les beaux en maillots. Qui dit 15 août, dit jour férié, farniente et rêve de Bretagne en été. Pourtant amis pèlerins, nous avons un chemin à tracer, fait d'amour et de violence, celui de la Route du Rock. Cette année encore, et peut-être même un peu plus que les précédentes, vous allez tomber mille fois amoureux, d'un regard, d'un accord de guitare, d'un déhanché ou d'une nappe de synthé. Qui dit 15 août 2024, dit journée parfaite pour ouvrir cette édition de La Route du Rock : ciel dégagé, soleil généreux et thermomètre bloqué à 23 degrés. Autant dire des conditions idéales pour une bonne claque musicale. Le Fort de Saint-Père, en toute sa majesté, est prêt à accueillir des vagues de décibels et des festivaliers en quête de riffs brûlants. Pas de pluie bretonne pour gâcher la fête (ou la magnifier, tout n'est question que de point de vue), mais juste une succession d'artistes prêts à électriser la scène. La programmation de ce jeudi était un subtil mélange de découvertes et de têtes d'affiche cultes, avec en prime une dose de folie nocturne. Alors, qui a vraiment brillé sous ce ciel d'azur ?


Acte 1. ENOLA - But the straight one
L'Australie ayant terminé une place devant la France au tableau des médailles des Jeux Olympiques, l'honneur lui revient de donner le coup d'envoi avec ENOLA, qui n'a pas attendu pour bousculer les festivaliers. Dès les premières notes, le fort est éveillé. Son post-punk incisif frappe fort et réveille la foule comme un shot de café à 6h du matin. Une belle entrée en matière qui prouve que la scène australienne a beau venir de si loin, elle reste toujours si proche dans nos cœurs. On l'attendait encore un peu timide, elle s'est révélée des plus mordantes. De quoi mettre tout le monde d'accord dès le début du festival.


Acte 2. Kae Tempest - La poète devenu le meilleur mc du royaume
Puis vient Kae Tempest, avec son flow imparable et ses textes à vous couper le souffle. Kae n'a pas besoin d'artifices pour conquérir le public. C'est brut, c'est puissant, et ça fait mouche. Chaque mot pèse une tonne, chaque phrase résonne comme un coup de tonnerre. Le silence respectueux du public en dit long sur l'impact de cette performance. Kae Tempest a pris la scène et nous a emmenés dans un voyage intérieur, où la poésie rencontre la réalité la plus dure. Il est à peine plus de vingt heures et nous avons déjà connu un premier moment de grâce.


Acte 3. Nation of Language – Hyped to death
On enchaîne avec Nation Of Language. Les attentes étaient hautes, trop peut-être. Parce que si leurs sons synthétiques nous avaient fait rêver sur album, en live, la magie n'a pas vraiment opéré pour moi (note : à un moment ou un autre je vais probablement dire du mal de votre groupe préféré, n'y voyez rien de personnel car je ne raconte ici rien d'autre que ma Route du Rock). Le show est bien huilé, mais manque cruellement de vie. C'est le genre de concert où tu regardes ta montre en espérant un sursaut d'énergie qui ne vient jamais. Dommage, parce qu'on les imaginait capables de bien plus. Reste une prestation correcte, mais qui laisse sur sa faim. La foule, elle, semble avoir apprécié, prouvant que la hype est souvent une affaire de perception.


Acte 4. Slowdive - Plongée dans un rêve
Après la déferlante sonore de Kae Tempest et l'ambiance synthétique de Nation Of Language, Slowdive prennent la scène pour envelopper le fort d'un voile de douceur. Leur shoegaze en apesanteur est un moment de pureté musicale, parfait pour calmer le jeu et replonger le public dans une transe douce. Les guitares réverbérées, les voix éthérées, tout est là pour nous bercer sous les étoiles bretonnes. Slowdive ont montré qu'ils étaient toujours les maîtres de leur art, offrant une performance planante qui contraste merveilleusement avec la tension des premières heures.


Acte 4. The Kills - Rockstars en titane
Et comment oublier The Kills ? Ce duo mythique, composé d'Alison Mosshart et Jamie Hince, incarne tout ce que le rock a de plus sexy et dangereux. On parle souvent de la crise des rock stars, mais ces deux-là prouvent que le genre a encore de belles heures devant lui. Leur set est impeccable, charismatique, et bourré de ces riffs assassins qui font leur réputation. Sur disque, The Kills peuvent être inégaux, alternant les tubes inoubliables et les titres plus anecdotiques, mais sur scène, ils sont irrésistibles. Chaque morceau est une décharge d'adrénaline, chaque mouvement est calculé pour captiver. Si certains passages de leur discographie divisent, leur performance live, elle, est indiscutable. Une leçon de rock.

Acte 5. Backxwash - Madame et sévices
Si The Kills ont mis le feu aux poudres, Backxwash fait tout exploser. Son rap agressif, teinté de métal, en un mot de l'horrorcore, transforme la scène en véritable champ de bataille. La foule ne se contente pas de suivre, elle est emportée dans une tornade de décibels et de rage. Les pogos sont devenus inévitables, et ce qui devait être un concert est devenu une émeute. La prestation de Backxwash restera gravée dans les mémoires comme le pic d'intensité de cette première journée. Si La Route du Rock est connue pour ses découvertes, alors Backxwash est la perle noire de cette édition.


Acte 6. Soulwax - un verre ça va, trois verres ça va, ça va, ça va
Pour clore cette première journée en beauté, Soulwax prennent le relais avec leur mélange unique de rock et d'électro. Le duo belge, qui n'en est plus à prouver sa maîtrise de la scène, livre une performance intense et millimétrée. Leurs beats électro sont mêlés aux guitares et à pas moins de trois batteries (oui, vous avez bien lui pas une, pas deux, mais trois !) pour un final explosif, transformant le Fort en une gigantesque boîte de nuit à ciel ouvert. Le public, déjà chauffé à blanc par les sets précédents, n'hésite pas à plonger tête la première dans cette apothéose de sonorités. Soulwax ont confirmé leur statut de leader dans leur genre, offrant un show aussi visuel que sonore, parfait pour finir sur une note haute.

Cette première soirée à La Route du Rock a une fois de plus démontré pourquoi ce festival est tant apprécié des amateurs de musiques libres. La programmation a su alterner entre découvertes prometteuses, artistes en pleine ascension et légendes confirmées. Le tout dans une ambiance où l'exigence n'exclut jamais l'accessibilité. La Route du Rock, c'est ce moment où l'on découvre de nouveaux talents, où l'on évalue la relève, où l'on vibre devant des groupes au sommet de leur art, et où l'on se délecte des performances des anciens. Cette première soirée nous a offert un festin musical varié, qu'on a savouré sans modération.

Crédit photographies : Titouan Massé & Nicolas Joubard
artistes
    The Kills
    Slowdive
    Soulwax
    Kae Tempest
    Nation of Language
    Backxwash
    ENOLA
    Naima Bock