Dans une salle guère peuplée, ce furent les anglais de Malpas qui ouvrirent une soirée dont le groupe phare, Cloud Boat, était attendu par l'essentiel du public. Également précédés de Rosie Lowe venue présenter son premier EP, ce concert s'annonçait comme paisible d'un point de vue musical, notamment marqué par l'absence de batterie sur scène.
Après avoir accompagné Cloud Boat sur une partie de leur tournée européenne, le prometteur duo
Malpas termine donc cette tournée par sa première date à Paris. Avec déjà deux EP à leur actif, ces deux musiciens touche-à-tout délivrent un set plus que surprenant étant donné l'heure de leur passage qui ne les empêche pas de captiver le public parsemé. Échangeant les instruments au gré de leurs morceaux, entre banjo et ukulélé, guitare et clavier strident, le tout accompagné d'une boite à rythme animée par un beat aux allures hip-hop, les Malpas nous font passer par tous les états.
La voix angélique du chanteur emplit rapidement la salle, aussitôt émue par les ballades mélancoliques à l'instar de
Sea Decide ou entraînée par des envolées électroniques telles que sur
Charlemagne. Au cours de ce set pourtant très court, on perçoit aisément toute la richesse de composition du duo qui, malgré un public encore timide, réussit à capter l'attention de tous.
Arrivés sans prétention, Malpas, lesquels présentaient leur deuxième EP
Where The River Runs au public parisien, s'annoncent sans bruit comme un groupe à suivre, de par des mélodies douces et attachantes ainsi que leur dynamisme sur scène. Le concert s'achève en trombe sur
Promise, avant que soudain tout ne retombe, laissant le public dans l'attente de les voir revenir un jour. Mais en tête d'affiche, cette fois.
Rosie Lowe prend ensuite le relais. Présentée comme la relève de Bat For Lashes, accompagnée de trois jeunes filles sur scène, l'anglaise distille une poignée de morceaux folk rythmés par des influences rythmiques éminemment hip-hop (elle a d'ailleurs collaboré avec le beatmaker Kwes pour son EP), tous extraits, à l'exception d'une reprise, de son
Right Thing EP sorti en fin d'année dernière. Et ce sont
10 000 Ballons et
Games qui s'illustrent parmi les autres chansons, au travers desquelles la chanteuse anglaise nous emporte avec une voix planante et impressionnante d'assurance.
Derrière un style très minimal, Rosie Lowe accompagnée de chœurs graves et légers ainsi que d'une basse funk énergique, offre quelques compositions épurées de grande qualité mettant toujours plus en avant une voix hors du commun, grave et profonde, qui hante la salle assombrie, sous le charme de la fragilité à peine perceptible de ces cordes vocales qui font vibrer les quelques nouveaux arrivants. Malgré un set également de courte durée, la chanteuse anglaise n'en a pas moins séduit le public tant par son charme et ses premiers mots en français, que par des sonorités trip-hop dont on devrait rapidement entendre parler à l'avenir.
Pour clôturer la soirée, les
Cloud Boat, accompagnés d'un guitariste supplémentaire, s'assoient sur scène pour un set sombre, mélancolique mais mélodieux. Dans la droite lignée des deux groupes les précédents, notamment de Malpas, le chanteur manipule ses pédales pour offrir un panel de sonorités différentes, tant à travers des envolées vocales stridentes que par l'écho qu'il donne à ses paroles noires, chantées sous forme de gospel pendant
Youthern. Les riffs de guitare sont lents, les notes aiguës tombent tantôt lourdement dans un écho sans fin, tantôt s'envolent au sein de réverbérations planantes.
Malgré la lente apesanteur dans laquelle nous emmènent Cloud Boat, la torpeur n'est pas loin de gagner la salle. Malgré les quelques éveils sonores proposés par le trio, la richesse des mélodies lancinantes laisse trop souvent place au silence et à la voix langoureuse du chanteur pour réellement réveiller le public.
Pink Grin I & II ne sont pas sans rappeler la période
Amnesiac de Radiohead, aux prémices du trip-hop, les Cloud Boat développent un son particulier, parfois proche de ce qu'a déjà pu produire James Blake (ami d'enfance du guitariste). Une base rythmique électronique des plus épurés, une voix claire régulièrement poussée dans les airs et des solos de guitare aux réverbérations puissantes et enivrantes.
Le seul point noir serait le manque, certainement voulu, de réelle activité de la part des musiciens sur scène. Bien trop statiques pour espérer créer un véritable lien avec le public parfois lassé plus qu'emporté. Toutefois le talent de ce groupe est indéniable. Et si, dans un lit au moment de s'endormir cela ne fait aucun doute, sur scène cela reste plus compliqué. Mais tous les espoirs sont permis car la promesse musicale est belle.