Ambiance tranquille à la Maroquinerie ce jeudi soir. Pas d'excitation débordante mais un public mixte de tout âge au rendez-vous, pour la troisième étape de la tournée européenne de RHODES.
A 20h pétantes la lumière s'assombrit lorsqu'un certain
Tommy Ashby prend place sur la scène. Pull gris trop grand, cheveux longs savamment négligés, le jeune écossais nous propose sept de ses compositions dont
Broken Bones, Passing Through, Wainting For The Fall. Tommy et sa guitare entament discrètement le concert avec des mélodies sympathiques, une guitare dans les harmoniques aigues et quelques petites blagues qui détendent le public, « I'm happy to be on the road with Rhodes ». Tommy Ashby ne décoiffe pas la salle mais l'amène avec douceur vers la tête d'affiche. Et c'est sur une petite révérence maladroite mais attendrissante qu'il quitte la salle quasi pleine à présent.
On peut se demander comment un artiste solo, qui vient de sortir un album intimiste dans lequel on ne trouve QUE des chansons délicates, lentes et vaporeuses, peut-il arriver à conquérir une salle et faire le show. Et bien RHODES en fait le pari. Rien à dire, il a le look qui fait craquer les groupies. Grand mais pas trop, blond aux cheveux assez longs pour retomber collés sur son front mouillé, teeshirt simple noir et tatouages au bras pour prouver qu'il n'est pas aussi sage que ses mélodies. Le musicien de Baldock a sorti quatre EPs depuis 2013. Son album,
Wishes, publié en septembre 2015, porte tous les espoirs de réussite.
Charismatique, RHODES occupe tout l'espace par sa seule présence et sa voix moins sage, plus accidentée, et du coup plus sexy que sur l'album studio (peut-être en conséquence de son concert à Amsterdam deux jours plus tôt). La tête levée vers le plafond, les yeux fermés, RHODES donne tout ce qu'il peut et n'hésite pas à se casser la voix dans les aigus, avant de revenir au calme. Les titres défilent, suivant quasi in extenso l'ordre de son album.
Close Your Eyes, Raise Your Love, You And I, Somebody... Le tout ponctué par quelques explications bienvenues et deux trois interjections adressées au public. Tommy est invité sur scène à plusieurs reprises. Dans l'ombre, toujours aussi discret, il double les refrains et accompagne à la guitare quand RHODES est au piano.
L'anglais est bon, il chante bien, sa belle Gibson Sunburst poussée sur la réverb installe une atmosphère mélancolique et planante. Mais son album ne brille pas d'originalité et le live à quelque chose de répétitif. Heureusement que les chansons ne sont pas trop longues et qu'il rythme le concert par des petites anecdotes. Malin, il lance un provocateur « gettin' sweat » qui fait glousser le premier rang. Néanmoins, la salle est plutôt immobile et statique. Difficile d'en être autrement. On comprend que sa voix charme, d'ailleurs, il est acclamé avec chaleur et l'on a même repéré quelques bouches murmurant les paroles (la gente féminine en particulier).
Mais par pitié, RHODES, point trop n'en faut. Les sentiments ne sont pas très bien dosés, ça frise le drame lors de ses longs cris déchirants achevés en vibrato. Au bout de treize titres, on a compris le mécanisme. Finalement, on le trouve plus sincère entre les morceaux.
Après
Let It All Go (coécrite avec Birdy), il termine son set par un intimiste
Wishes, puis
Breathe. Pari tenu donc, le jeune chanteur a réussi à maintenir la concentration de la salle jusqu'au bout. C'est indéniable, RHODES a son public. Et comme l'ont dit deux trentenaires en sortant : « Il a une technique de chant im-pre-ssio-naaante ! ». Il se sert très bien de son organe, on est d'accord. Mais je dois dire qu'après
Morning qui clôt le rappel, on a plutôt envie de prendre la direction du lit.