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Suede

Paris, Maroquinerie - 10 octobre 2022

Live-report par Laetitia Mavrel

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Nous avions déjà attesté en mai dernier de la forme olympique de Brett Anderson sur scène, lors du concert anniversaire de Coming Up. Deux heures d'un show explosif, que les musiciens nous avaient servi sur un plateau d'argent, tant la majestueuse Salle Pleyel s'était alors transformée en hammam de par la chaleur qui s'y était très rapidement répandue. Depuis, le groupe a poursuivi son petit bonhomme de chemin pour nous offrir lors de cette rentrée Autofiction, neuvième album studio qui continue de briller par sa puissance ainsi que sa fougue juvénile et terriblement sexy, rendant ainsi ses très grandes lettres de noblesse au Suede des premiers jours.

Il faut donc s'attendre à un retour de Suede en 2023 pour une tournée des grands ducs, avec des arénas britanniques rassemblant quelques milliers d'adeptes au Royaume-Uni et peut-être une belle salle de par chez nous, les londoniens faisant étonnamment l'objet d'un culte plutôt réduit en France malgré leurs trente ans de succès. Soit, nous attendrons patiemment. Mais ce programme plan-plan ne prend pas en compte la soif intarissable de Suede de venir à la rencontre de ses fans, voilà pourquoi le groupe s'est lancé en ce tout début d'automne dans une mini tournée intimiste pour présenter son dernier né, le menant dans une série de petits clubs outre-Manche et en Europe, devant quelques centaines de privilégiés par représentation, comme pour dresser un parallèle avec cette incroyable retour aux sources rock célébré par le disque.


Ainsi, Paris accueille Suede en ce lundi aux températures au-delà des moyennes saisonnières (un signe qui ne trompe pas) à la Maroquinerie, pour un concert qui va voir se dérouler l'intégralité d'Autofiction dans un premier set, suivi par un second en mode hits durant deux heures qui n'en sembleront même pas une tant elles défileront à toute vitesse. Le public présent ne s'y est pas trompé : ayant décroché le sésame avant l'été, l'excitation est montée crescendo depuis que le dernier album est arrivé sur les platines. On retrouve alors devant la salle une longue file d'attente dont les premiers occupants, en majorité anglais, nous font savoir qu'ils campent dans la rue Boyer depuis six heures du matin. D'où un certain courant électrique planant autour des portes qui lorsqu'elles s'ouvrent enfin, laissent pénétrer dans la petite salle surchauffée une vague d'admirateurs déjà éreintés mais surexcités par ce qui va suivre.

Entre fans de la première heure et plus jeunes auditeurs, probablement biberonnés aux disques de leur parents, le public explose littéralement lorsque pénètrent sur scène les Anglais pour qui s'accommoder de seulement quelques mètres carrés en lieu et place des grandes scènes qu'ils ont pour habitude d'occuper ne semble poser aucun problème. Et celui qui remporte la palme de la classe absolue est évidement Brett Anderson, chemise blanche et jean clair, toujours aussi élancé et rayonnant, qui ne laissera pas plus de dix minutes de répit à ses vêtements avant de les inonder de sueur tant l'énergie déployée dans son chant et son jeu de scène est immédiatement poussée au maximum.

L'interprétation d'Autofiction, dans l'ordre du tracklisting, permet de vérifier toutes les critiques entendues ici et là à propos de cet album qui représente pour beaucoup comme une seconde naissance. Défini par le groupe lui-même comme son disque punk tant attendu, les larsens de guitare et la ligne de basse imposante sont tout aussi efficaces sur scène, et l'on se réjouit de retrouver pour les plus anciens une configuration qui ne permet aucun filtre. Lorsqu'arrivent les morceaux les plus profonds, on retrouve Brett Anderson s'agenouillant devant son public, s'affaissant au sol comme un pénitent, la voix magnifiquement chaude et gorgée d'émotion.


Tel les « Jack in the box » qui surgissent de leur boîte sans crier gare, Brett bondit sur le devant de la scène afin de venir chercher son public, bras et micro tendus, de droite à gauche, toujours à la recherche d'un contact physique avec cette foule qui ne cesse de lui crier son amour. Comme à l'accoutumée maintenant, et comme un rituel attendu tel le bénédicité à la messe et sa distribution d'hosties, les fans accueillent Brett Anderson bras ouverts dans la fosse, qui d'accolade en accolade aura partagé en plus de son énergie abondante quelques litres de sueur et provoqué pas mal de palpitations dans les cages thoraciques.

Le second set fait place à une petite série de tubes favorisant les premiers disques et participant ainsi à entériner un peu plus le statut de mastodonte du groupe dans le cœur de ces anciens adolescents ayant vécu pleinement les années Britpop, celles qui fleuraient bon le règne incontesté des dandys filiformes et androgynes, à la plume raffinée un brin décadente qui ont beaucoup été copiés mais clairement jamais été égalés à ce jour.
We Are The Pigs, Trash, So Young, Metal Mickey, Animal Nitrate, Beautiful Ones... C'est un défilé de tubes et un voyage en Delorean qui s'accomplit ce soir dans la petite salle du 20ème arrondissement, et la promiscuité des lieux permet à tous les chanceux qui ont connu telles configurations il y a trente ans de tout simplement se sentir revivre. Brett Anderson et son époustouflante vitalité ainsi que son inépuisable talent de composition rappellent à ceux qui en doutaient encore que l'heure de la retraite est loin d'avoir sonnée.

Tant que la chemise est ainsi mouillée, nous ne nous en plaindrons pas.
setlist
    Autofiction
    She Still Leads Me On
    Personality Disorder
    15 Again
    The Only Way I Can Love You
    That Boy on the Stage
    Drive Myself Home
    Black Ice
    Shadow Self
    It's Always the Quiet Ones
    What Am I Without You?
    Turn Off Your Brain and Yell
    ---
    This Hollywood Life
    We Are The Pigs
    It Starts And Ends With You
    Trash
    The 2 Of Us
    So Young
    Metal Mickey
    Animal Nitrate
    Beautiful Ones
photos du concert
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