Ebbb

Ça y est, c'est la rentrée ! Non pas au bureau ni à l'école, celles-ci sont déjà loin derrière nous avec les décorations de Noël, mais bien la reprise des concerts. Après une petite pause très salutaire, aller retrouver ses petits camarades de fosse dans les salles demeure un réel plaisir. Armés de nos plus grosses doudounes et écharpes en cet hiver glacial, nous faisons donc notre retour chez les copains du Supersonic, toujours fidèles au poste quelque soit la période de l'année.


Ainsi, nous nous laissons tenter en ce lundi soir par le retour des londoniens de Ebbb, à peine quelques semaines après avoir assuré la première partie de Porridge Radio au Trabendo. Le trio anglais semble apprécier la capitale, s'étant avant cela produit à quelques centaines de mètres de la rue Biscornet, au POPUP!, lors des soirées Avant-Garde du Pitchfork Music Festival au mois de novembre. C'est à la lecture des comptes-rendus de nos collègues que nous nous sommes décidés à entamer 2025 avec Ebbb et leur drôle de noise-pop, assez indéchiffrable sur disque et qui, reconnaissons-le, nous avait laissé plutôt perplexes à son écoute. On nous a alors évoqué des ambiances envoutantes, presque messianiques, il n'en fallait pas plus pour nous convaincre, nous et une courageuse petite poignée de spectateurs, tout anorak dehors, et ce même à l'intérieur du club !

Cette soirée nous procure d'étranges sensations. Un peu comme un réveil légèrement comateux après toutes ces semaines de repos loin des scènes. Le froid n'aidant pas à la motivation, Ebbb prennent possession de la scène vers 22h devant un parterre clairsemé mais néanmoins attentif, beaucoup de présents les ayant découverts au Trabendo, et souhaitant percer le secret de cet étonnant trio. Le set sera court et concis, c'est en effet durant quarante minutes, dans la quasi-pénombre, que Will Rowland, Scott Macdonald et Lev Ceylan vont créer une sorte de microcosme fait de sonorités électro dissonantes et pénétrantes, la cadence tantôt lente tantôt tribale, martelée assez sauvagement comme fil conducteur venant semer un certain trouble parmi les néophytes. Avec seulement deux instruments (synthétiseur et batterie) c'est un univers extrêmement dense qu'arrivent à créer Ebbb, porté par le chant cristallin de Will, atteignant des aigües assez incroyables, dont on n'arrive pas à se décider s'il dénote totalement ou, au contraire, relève du génie tant le tout nous semble si savamment disharmonieux.


L'EP All At Once, paru sur Ninja Tune l'été dernier, est à la hauteur de la réputation de ce label qui se veut un laboratoire d'expérimentation des plus audacieux. Peu accrocheur à la première écoute, paraissant presque trop difficile à apprivoiser, le rendu sur scène est plus accessible mais demeure néanmoins légèrement confus. Des morceaux comme Himmel ou Torn semblent parfaits comme bande son de soirée mais pour un public averti, et leur introduction dans le club de la Bastille, de plus légèrement vide, ne permet pas à leur formule si particulière de prendre réellement. On ne saura pas vraiment si des fans du groupe étaient présents, le résultat étant parmi le public beaucoup d'étonnement, d'où une petite réserve à se laisser charmer par cette drôle de magie que produit Ebbb.

Et pourtant, leur univers musical si complexe est attirant, mais pour cette troisième parisienne, les conditions n'étaient malheureusement pas encore à la hauteur de leur potentiel. Nous sortirons donc de cette courte prestation sur la réserve mais néanmoins très curieux de continuer à suivre les travaux de Ebbb, qui nous ont présenté ce soir quelques inédits. Le groupe a eu le mérite de nous faire débuter 2025 complètement en dehors de notre zone de confort, comme un bon coup de Doc Martens aux fesses afin de nous remettre rapidement au boulot pour être présents aux nombreux rendez-vous musicaux qui sont déjà notés dans nos calepins.