Même si l'on est plutôt gâtés ces dernières années en matière d'artistes et groupes de rock, il peut se passer de longues périodes sans tomber sur une perle, un album ou un EP qui sort du lot. Sans forcément toujours savoir pourquoi, certains nous prennent aux tripes plus que d'autres par leur originalité, leur courage ou leur vulnérabilité.
Ce mois-ci, ce sont Witch Fever, venus de Manchester, qui nous envoient une claque dans la face, dès le premier morceau éponyme de leur EP Reincarnate. A la croisée entre le metal, le grunge et le punk rock, ce premier titre est un cocktail explosif de grosses guitare et basse, de voix saturée et de batterie sauvagement frappée. Le pont, quant à lui, ne peut que nous obliger à headbanger. Et le cri primal d'Amy Walpole, répété de multiple fois en fin de piste, est cathartique : « after all that I've been through / after all that I've seen / you won't break me ». Un bon mélange de tout ce qui est à venir, et qui rend très curieux d'écouter la suite de l'EP.
In The Ressurect ne nous laisse pas le temps de reprendre notre respiration : il débute par un spoken word d'Amy accompagné par la batterie puissante d'Annabelle Joyce. Les paroles mêlent imagerie biblique et horrifique, les deux sources d'inspiration principales de la chanteuse, ayant souffert de ses seize années à l'église. Amy joue avec plusieurs voix différentes, mêlant parties pratiquement parlées, cris enragés, et chant mélodique montant dans de jolis aigus qui finissent souvent par dissoner, comme sur Abject. La voix peut changer à tout moment et c'est cela qui fait son charme.
Les influences sont nombreuses sur cet EP, mais l'on peut avant tout citer Rage Against The Machine, surtout à l'écoute des deux premiers titres. Les répétitions de phrases coup de poing, « you're the one to blame » sur Initiation, ou au message parfois cru, comme sur In Birth, et l'énergie déployée, sont phénoménales. Chaque titre est exaltant, à la fois sombre avec des guitares hardcore, mais également solaire.
Le dernier morceau, Bully Boy, clôt l'EP de manière énervée et montre que Witch Fever (en référence à la cruelle chasse aux sorcières ayant eu lieu XVIIe siècle) ne sont pas là pour enfiler des perles, si l'on s'en tient aux cris répétés en chœur : « off with his head! ».
Le travail de la fusion des différents styles musicaux est recherché et apporte une dimension nouvelle au genre. Avec des groupes comme Witch Fever, le hardcore a encore de beaux jours devant lui et il nous tarde d'écouter le premier disque à paraître bientôt de ces quatre artistes et de pogoter dans la fosse lorsqu'ielles feront la première partie de la tournée d'IDLES l'an prochain.