Olly Bailey alias Jaws The Shark nous avait laissés l'année dernière avec un EP quatre titres. Le revoici déjà avec Cream et ses cinq morceaux nerveux à souhait.
Il faut dire que sur ses deux précédents efforts, notre ami n'était pas vraiment d'humeur à nous aider à identifier clairement de quoi il en retournait. Entre certaines compositions inspirées d'un post-punk énergique, mais néanmoins assez propre et moderne, et des titres qui tiraient clairement vers un teenage rock désuet, s'y retrouver n'était pas vraiment une entreprise aisée.
Cream ne risque pas vraiment de nous en dévoiler beaucoup plus sur les intentions de l'artiste, puisque dès les premières notes du très engageant Silver Sun, on sent bien que quelque chose de louche se trame. Nous voilà dès à présent embarqué trente ans en arrière, à l'époque des chemises à carreaux, des cheveux gras et d'une vague grunge qui a secoué toute une génération. Ce titre très ensoleillé et festif fonctionne à merveille pour qui n'a pas peur de l'auto-dérision et accepte de se laisser emporter un tant soit peu d'une certaine nostalgie adolescente. Suff City s'articule sur les mêmes rouages, et même si le ton se fait un peu plus sombre que sur le flamboyant Silver Sun, la recette est peu ou prou similaire.
Jaws The Shark joue ici sur un répertoire où l'idée est de ne pas vous encombrer de superflu. Il est question d'aller le plus vite possible et de vous toucher dans des délais brefs avec des refrains imparables. À cet égard, Waiting For Something maîtrise parfaitement cette partition tout en s'éloignant quelque peu des terrains de jeu des deux premiers morceaux. Alors, bien entendu, résumer la musique de Jaws The Shark à un simple clin d'œil à cette période serait assez réducteur et peu flatteur. Nul doute qu'Olly n'aimerait pas qu'on lui explique qu'il n'est qu'une pâle copie de groupes d'antan. Voilà qui aurait aussi tendance à vous faire passer à côté de l'intérêt des morceaux qui nous intéressent ici.
Seulement voilà, Jaws The Shark flirte de façon si évidente avec des codes maintes fois vus et éculés qu'on peine à ne pas penser à une demeure familière où chaque pièce aurait déjà été visitée de fond en comble. Ici, difficile de s'emballer totalement pour une histoire qui nous a déjà été mainte fois contée, et ce malgré tous les efforts de sincérité déployés. Le plus effrayant reste peut-être ce Lie To Me, où les premiers accords font apparaître le fantôme des Australiens de Silverchair et de leur titre Freak. Plutôt amusant lorsque l'on sait que ce groupe avait lui-même un morceau nommé Lie To Me sur son album Freak Show. Nous voici à souhaiter que tout cela ne soit qu'un malheureux hasard.
Malheureusement, le très satisfaisant Trash Puppy ne fera pas passer cet arrière-goût désagréable que nous laisse Cream. Jaws The Shark ne ment pas, vous fera certainement passer encore une fois un excellent moment, mais l'ensemble est une nouvelle fois vraiment bien trop stéréotypé pour que l'on ait envie d'y revenir régulièrement. Sauf si ces ingrates années lycées vous manquent vraiment trop.