Le temps d'un album, Blur ont décidé de se retrouver pour livrer le mélancolique The Ballad Of Darren. Les dix titres reprennent tous les éléments qui ont élevé le quatuor au statut de prodiges de la pop : le talent de storytelling d'Albarn, les riffs distordus de Coxon, les lignes de basse langoureuses d'Alex James et la rythmique imparable de Rowntree. Blur ont gardé la vitalité de leurs débuts mais la délicatesse et la nostalgie des compositions de ce nouveau disque prouvent qu'ils sont bien plus que le groupe de britpop dans lequel la presse musicale mainstream les cantonne trop souvent.
Deuxième essai plus que réussi pour The Murder Capital, auteurs d'un album magistral. Comme dans un bon polar, l'ambiance est lourde, mais les personnages attachants. Gigi's Recovery est un classique qui se dévoile un peu plus à chaque écoute. Toujours en mouvement, le groupe nous avait confié avoir longtemps travaillé sur l'écriture et les textures sonores : ce sens du détail et ce souci de l'amélioration se sont aussi remarqués sur scène, l'autre lieu d'excellence d'un groupe qui continue de se bonifier.
Après l'album éponyme ayant signé leur retour en 2017, Slowdive ont sublimé leur discographie avec everything is alive. Envoûtant du début à la fin, ce disque est une collection d'envolées noisy et éthérées sur lesquelles l'ambiant est venu s'immiscer dans les compositions. Au-delà de tubes tels que kisses ou alife, Slowdive nous entraînent dans ce lent plongeon vertigineux le temps de prayer remembered ou encore andalucia plays. Il aura fallu probablement plus de trente ans aux Anglais pour sortir leur chef-d'œuvre. L'attente en valait en tout cas sacrément la peine.
Pas étonnant que pour leur second album, bdrmm aient signé sur le label de Mogwai. On retrouve sur I Don't Know ce même don pour la variété de styles abordés – electro, rock, ambient… – tout en conservant une réelle cohérence et un souci constant de la mélodie. Un album extrêmement riche, qui révèle toutes ses subtilités au fil des écoutes, et qui a reçu un concert de louanges depuis sa sortie. Il ne vous reste qu'à l'écouter pour comprendre que ces dernières sont ô combien méritées...
Depuis leurs débuts en 2017 Fontaines D.C. ont imposé trois albums sans un seul faux pas. Il semble bien que ce sans-faute ne fût pas de nature à rassasier leur chanteur Grian Chatten, revenu en solo en cette année 2023. Chaos For The Fly s'affranchit des limites de Fontaines D.C. et révèle l'étendue de l'univers de l'irlandais. Il est une véritable respiration, une ouverture sur la personnalité d'un artiste que l'on savait talentueux et qui dévoile ici toute sa richesse. De ambiances tendue de Fairlies à l'intime The Score, jusqu'au grandiloquent Bob's Casino, l'artiste tombe juste à chaque instant, et fait de Chaos For The Fly est une réussite totale. Impossible de ne pas célébrer ce merveilleux LP avec une place de choix dans ce classement.
Le retour en force de Daughter se sera concrétisé avec Stereo Mind Game, un album qui aura transcendé les attentes. Sept ans depuis sa dernière sortie majeure, le trio britannique a maintenu sa signature sombre tout en introduisant un nouveau spectre sonore et en explorant diverses influences : de l'indie au punk, du folk au trip-hop, offrant une évolution organique plutôt qu'une rétrospective forcée. Les singles comme Be Your Own Way et Party révèlent la voix mélancolique d'Elena Tonra sur des nuances de post-punk lumineux. Stereo Mind Game est une œuvre éclectique qui témoigne de l'évolution créative de Daughter, établissant un équilibre entre une certaine familiarité et une exploration audacieuse.
Depuis quand un groupe de rock londonien n'avait déchaîné de telles passions ? Têtes à claques arrogantes, esthètes arty et branchés, amateurs approximatifs, trio libre et radical, cette année on aura tout écrit et tout lu au sujet de bar italia. Si leur culte du secret et leur mutisme scénique épatent autant qu'ils agacent, Tracey Denim vient clore tout débat. Ce classique instantané qui révèle à chaque écoute de nouvelles beautés est appelé à devenir un album culte, un pied dans le passé, l'autre dans l'avant-garde, soit les deux parfaitement dans l'époque.
La manière la plus courante de présenter Gaz Coombes l'a toujours ramené à son précédent statut de chanteur de Supergrass. Nul doute que la nouvelle année le verra désormais présenté comme l'auteur de Turn The Car Around, quatrième album solo se jouant de la pop anglaise comme d'autant de nobles traditions en mal d'époussetage. Tantôt lascive et psychédélique, tantôt funky, la fuite de Gaz se fait aussi crooner, orchestrale, intimiste, jonglant d'une inspiration à l'autre avec un talent toujours égal. Un album beau, éclectique, et mélancolique, comme une dernière goutte de pluie sur le pavé de Wardour Street.
Plus de 20 ans après leurs débuts, The Coral continuent à épater. S'inspirant des B.O. de Western Spaghetti, de Townes Van Zandt et des Byrds, le mystérieux et gothique Sea Of Mirrors se signale d'abord par sa sublime production, acoustique et scintillante, s'enroulant autour des envolées de cordes de Sean O'Hagan. The Coral ramènent plusieurs perles étincelantes des profondeurs, dont la superbe Faraway Worlds, un de leurs plus beaux morceaux, That's Where She Belongs, Sea of Mirrors, North Wind ou encore Wild Bird.
Bien que teinté de tristesse, le retour de Depeche Mode s'est fait avec grâce. Disparu l'an passé, Andrew Fletcher semble toujours cimenter ce groupe qui ne cesse depuis quatre décennies de bercer nos âmes mélomanes. Abordant des facettes électroniques et rock glacé, Memento Mori est, tel le phénix, l'album de la fin et de la renaissance. De la douceur de Ghosts Again à la profondeur de My Cosmos Is Mine en passant par la sensualité de Soul With Me, il trouve parfaitement sa place en 2023 parmi la nouvelle scène britannique.